Pour rappel, l’employeur qui décide de rompre le contrat de travail doit justifier d’un motif de licenciement reconnu par la loi.
On distingue 2 grandes catégories de motifs de licenciement :
• le motif économique : on parle de licenciement économique lorsque ce dernier résulte d’une suppression ou d’une transformation d’emploi ou d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.
• le motif personnel (inhérent à la personne du salarié) : il peut s’agir d’une faute (insubordination, absence injustifiée …) dont le degré de gravité est variable (faute sérieuse, faute grave, faute lourde). Il peut également s’agir d’un comportement non fautif (ex : l’insuffisance professionnelle).
Par ailleurs, le motif économique de licenciement invoqué par l’employeur ne doit pas cacher un motif personnel : l’employeur ne peut pas prendre prétexte de difficultés économiques pour licencier un ou plusieurs salariés auxquels il est en réalité reproché une insuffisance professionnelle par exemple ou une inaptitude physique.
La jurisprudence a fixé les contours de chacun des différents motifs de licenciement.
Qu’il soit économique ou personnel, le motif du licenciement est soumis à la libre appréciation des juges. Il appartient en effet au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués.
C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 26 octobre dernier (Cass. soc. 26 octobre 2022, n°20-17.501).
En l’espèce, un salarié en arrêt de travail pour maladie est convoqué à un entretien préalable à un licenciement économique par lettre du 20 novembre 2017.
En parallèle, le 24 novembre 2017, le salarié a adressé à son employeur un arrêt de travail pour maladie professionnelle avant de l’informer quelques jours plus tard qu’il avait formé une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de l’assurance maladie et qu’il avait pris attache avec la médecine du travail pour une visite de reprise.
Son licenciement pour motif économique pour cessation totale d’activité de l’entreprise lui est notifié le 6 décembre 2017.
Le salarié conteste son licenciement l’estimant fondé en réalité sur son état de santé.
La cour d’appel fait droit à sa demande et prononce la nullité du licenciement, estimant que le véritable motif du licenciement était lié à l’état de santé du salarié et donc discriminatoire.
Elle considère qu’à la date de notification du licenciement économique, le 6 décembre 2017, l’employeur était informé de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formée par le salarié et de ce qu’il avait saisi le médecin du travail en vue d’une reprise, et qu’ainsi, il disposait d’éléments suffisants lui permettant de retenir que l’état de santé du salarié pourrait faire l’objet d’une inaptitude en lien avec l’activité professionnelle.
Pour rappel, pendant la période de suspension du contrat de travail liée à un arrêt de travail, l’employeur ne peut pas rompre le contrat du salarié, sauf faute grave de celui-ci ou si l’employeur est dans l’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie.
L’employeur s’est pourvu en cassation, arguant notamment que les juges d’appel auraient dû vérifier si la cessation d’activité invoquée par l’employeur constituait bien la véritable cause du licenciement.
La Cour de cassation fait droit à la demande de l’employeur et censure la décision de la Cour d’appel. Elle rappelle d’une part, que : « constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié résultant d’une suppression d’emploi consécutive, notamment, à la cessation d’activité de l’entreprise » et qu’en cas de coexistence d’un motif économique et d’un motif personnel, il convient de rechercher celui qui a été la cause première et déterminante, et d’apprécier le bien-fondé du licenciement au regard de cette seule cause.
En conséquence, les juges d’appel auraient donc dû rechercher si la cessation d’activité de l’entreprise invoquée par l’employeur à l’appui du licenciement ne constituait pas la véritable cause du licenciement, peu important l’état de santé du salarié.