Des auspices a priori favorables et pourtant...
Une météo particulièrement clémente, une légère amélioration du pouvoir d’achat des ménages, un afflux de touristes pour l’Euro de foot, les conditions semblaient réunies pour que l’activité des acteurs de la filière HCR se redresse cet été dans la majorité des régions françaises. Au lieu de cela, le chiffre d’affaires s’est dégradé de 4, 5% au troisième trimestre 2016, par rapport au même trimestre de l’année précédente. La tendance annuelle se détériore un peu plus et s’établit à près de – 6% à l’issue de la saison estivale, qui a été tout particulièrement morose pour l’hôtellerie et la restauration.
De façon générale, les professionnels déplorent une baisse de clientèle, du ticket moyen tandis que la situation des marges reste préoccupante et que celle de la trésorerie reste tendue.
Une situation qui diffère en fonction des métiers et des régions
Ile de France et PACA ; deux régions en souffrance tous secteurs confondus
Les difficultés liées aux attentats ont affectés particulièrement les professionnels implantés en Ile de France et en PACA. Pour les premiers, l’activité reste sinistrée avec au cours de l’été une baisse de l’ordre de – 11% tandis que les deuxièmes accusent un repli de -5, 5% sur l’ensemble du trimestre.
Les restaurateurs franciliens enregistrent un recul de 11, 5% et ceux de la région PACA de 7,5%. Les baisses d’activité pour l’hôtellerie atteignent – 12% en Ile de France tandis que la région PACA parvient à limiter ce recul à -3%. La situation des débits de boissons continue elle aussi de se dégrader ainsi l’Ile de France enregistre un recul de -8% et la région PACA de – 5%.
Persistance des tensions chez les restaurateurs
A l’exception du regain d’activité ayant bénéficié aux restaurateurs des Pays de la Loire ( +5%), d’Auvergne-Rhône-Alpes( +4%) et du Grand-Est (+1%), la situation dans la restauration reste tendue. La désertification des restaurants persiste au cours de la saison estivale et près de la moitié des professionnels interrogés sont confrontés à une baisse de fréquentation de leur établissement. Dans le même temps, les clients demeurent attentifs à leurs dépenses ainsi, 37% des restaurateurs remarquent que cette baisse de fréquentation s’accompagne aussi d’une baisse du ticket moyen. Le chiffre d’affaires recule de -5 % par rapport au même trimestre de l’année précédente. Les tendances annuelles restent quant à elles très détériorées, proches de -6,5%. Malgré ces difficultés persistantes, les marges tendent à se stabiliser même si la trésorerie reste fragile.
Des résultats décevants pour l’hôtellerie à l’exception de la Bretagne
L’activité de l’hôtellerie a été globalement décevante pendant la saison estivale. La baisse s’établit à – 6% pour les hôtels et à -5,5% pour les hôtels-restaurants. L’afflux des touristes venus pour l’Euro n’a pas profité à l’hôtellerie professionnelle qui s’affiche dans le rouge sur la quasi-totalité du territoire, avec des baisses particulièrement marquées dans le Nord Est ( - 8% en Bourgogne-Franche-Comté et -6% dans le Grand-Est) et en Nouvelle Aquitaine ( -6%).
Seuls les hôteliers implantés en Bretagne ont profité de ce bel été avec une hausse de +5,5%.
Tout comme pour les restaurateurs, les hôteliers cumulent baisse d’activité et baisse du ticket moyen pour 50% d’entre eux. La situation des marges se détériore un peu plus au cours du 3ème trimestre 2016. Plus de quatre hôteliers sur dix font en effet part d’une baisse de cet indicateur. L’état de la trésorerie des hôteliers redevient fortement préoccupant et plus d’un tiers des responsables sont confrontés à une dégradation de leur situation financière.
Une situation très inégale selon les régions pour les débits de boissons dont la baisse tend à s’atténuer
La baisse sensible de l’activité des débits de boissons enregistrée depuis les attentats de 2015 tend à s’atténuer au cours de l’été 2016. Cependant les rythmes annuels d’évolution restent détériorés avec -4, 5% pour les cafés-Bars et -4% pour les brasseries.
Néanmoins, la situation des débits de boisson apparaît différenciée selon les régions. Ainsi, les professionnels implantés dans le quart nord-est, en Normandie et en Occitanie ont accusé des baisses se situant entre -2,5 % et -3% quand, sur la même période, leurs confrères voyaient leur activité se redresser sur la façade atlantique ( +3,5% en Bretagne, + 4% en Pays de la Loire), dans le Centre, Auvergne et Rhône-Alpes avec +2, 5%.
Là encore, le ticket moye tend à se détériorer mais dans une moindre mesure car ils sont 32 % à enregistrer une baisse contre 21 % à appréhender une hausse de cet indicateur. L’évolution des marges est toujours à la baisse pour 24% d’entre eux et les tensions en matière de trésorerie s’estompent car ils ne sont plus que 23% à faire face à une dégradation de leur situation financière, contre près de 50% il y a six mois.
Des perspectives d’activité assez sombres...à l’exception des traiteurs
L’activité des traiteurs s’est raffermie au cours de l’été et a presque atteint l’équilibre. Ils sont les seuls à entrevoir une réelle sortie de crise au cours des mois prochains et près d’un tiers d’entre eux misent sur une hausse de leur activité en fin d’année.
En revanche les restaurateurs comme les hôteliers entrevoient une fin d’année morose et craignent de voir leurs difficultés se prolonger au dernier trimestre 2016, dans presque toutes les régions de l’hexagone tout particulièrement dans le sud de la France, seuls ceux du Grand-Est font preuve d’un certain optimisme.
Sur la France entière, les restaurateurs sont en moyenne de 23% à anticiper des baisses d’activité mais ces prévisions varient fortement d’une région à l’autre. Ainsi sont-ils 67% en Bourgogne Franche-Comté à anticiper une baisse d’activité pour le prochain trimestre suivis de près par les restaurateurs de la moitié sud qui sont également très inquiets avec 51% en Occitanie, 44% en Nouvelle Aquitaine ou bien encore 36% en PACA et Corse à envisager une baisse.
Les hôteliers craignent également une réelle perte d’activité et, avec une moyenne nationale de 26%, les écarts se creusent en fonction des régions. Ils sont 61% à anticiper une baisse en Bourgogne Franche-Comté comme ceux de la moitié sud également très inquiets quant à une baisse d’activité où ils sont 46% en Nouvelle-Aquitaine et 47% en Occitanie alors qu’ils ne sont plus que 3% de professionnels du Grand-Est.
Les professionnels des débits de boissons sont 18 % à envisager une baisse d’activité en moyenne pour le prochain trimestre, néanmoins les estimations fluctuent également en fonction des régions. Ils font preuve d’une certaine sérénité dans les Pays de la Loire et le Grand-Est avec une estimation positive de leur activité avec respectivment 13% et 6 % à envisager une amélioration quand, dans le même temps, leurs confrères de l’hexagone se montrent nettement plus préoccupés en étant 46% dans le Centre-Val de Loire et 45% en Bourgogne Franche-Comté a s’attendre à une baisse.
Les intentions d’embauche sont très limitées, voire confidentielles, pour ce quatrième trimestre, tant en ce qui concerne l’emploi des permanents que des saisonniers. Pour les débits de boissons, l’analyse reste la même avec la crainte de voir resurgir de vives tensions en fin d’année. Là encore le Grand-Est fait exception en faisant preuve d’une certaine sérénité pour la fin d’année, rejoint sur ce point par les Pays de la Loire.
Des raisons objectives d’inquiétude
L’inquiétude des professionnels du secteur est principalement liée aux trois facteurs que sont la modification du calendrier scolaire, la persistance des difficultés liées aux attentats et la concurrence de l’économie dite collaborative.
La modification du calendrier scolaire mécontente les hôteliers en raison de son impact négatif sur l’activité, pour la majeure partie du territoire. En effet, le raccourcissement des vacances scolaires estivales a eu pour conséquence la perte d’une semaine de pleine saison sur les 9. Dans le même temps, les dates de vacances de la Toussaint fixées en milieu de semaine cette année, font que les hôteliers perdent un week-end d’activité quand on sait que traditionnellement les réservations se font du samedi au samedi. Les deux semaines des vacances de la Toussaint ne sont donc pas un gain pour les hébergements, les taux de départs à ces dates étant traditionnellement bas…
Seule l’avancée des vacances de Pâques semble contenter les professionnels des stations de sport d’hiver. En 2017, même inquiétude, mais sur la première semaine de juillet cette fois-ci car, avec une fin des cours fixée au samedi 8 juillet, la conséquence prévisible est que les départs ne s’effectueront pas avant le weekend du 14 juillet, soit un réel risque de perdre deux semaines de pleine activité.
La persistance des difficultés suite aux attentats meurtriers continue d’inquiéter. Après avoir participé à l’effondrement de l’activité du secteur, aujourd’hui, les effets en sont toujours ressentis de façon inégale sur le territoire. Aussi, après des mois de difficultés, les entreprises font face à d’importants problèmes de trésorerie et la question du maintien de l’emploi de leurs salariés se pose aujourd’hui. Certes les 10 millions débloqués par le Ministre des Affaires étrangères et du Développement international afin d’assurer la promotion de la destination France est un des leviers à actionner pour retrouver une dynamique positive mais il n’en faut pas pour autant négliger les autres.
Enfin plus inquiétant encore que ces facteurs conjoncturels, il apparait qu’une météo favorable et qu’un afflux de touristes comme au moment de l’Euro n’ont plus les effets escomptés par les professionnels du tourisme. Il s’agit là d’une nouvelle démonstration que le secteur est entré dans une véritable crise en raison d’une concurrence déloyale de nouveaux acteurs appartenant à l’économie dite collaborative vers lesquels les clients se tournent afin de profiter de prix plus attractifs en l’absence de charges sociales et fiscales, boudant en parallèle les professionnels du tourisme.
Aussi, au regard de la situation, Didier Chenet, continue donc de réclamer au nom du GNI ”des mesures en direction des professionnels du secteur HCR et suggère de mobiliser à cette fin le fonds de modernisation de la restauration tant sur les aspects communication qu’aides aux professionnels”. Il demande ”par ailleurs un allègement immédiat des charges sociales et fiscales qui pèsent sur les entreprises ainsi qu’un moratoire partiel des charges social à hauteur de 15%. Il s’agit aujourd’hui de préserver l’emploi et cette mesure, qui pourrait être étudiée au cas-par-cas, aurait l’avantage d’avoir un effet immédiat. Les reports d’échéances qui ont été mis en place ne sont que des reports…”
D’autre part, il sollicite le gouvernement afin de prendre les mesures nécessaires pour accompagner les professionnels fortement touchés par la concurrence déloyale des nouveaux acteurs de l’économie dite collaborative. Le GNI demande la mise en œuvre de mesures garantissant une équité sociale et fiscale entre tous les acteurs. Pour cela il souhaite la promulgation de la Loi Numérique et de ses textes d’application en urgence, avec concertation directe de nos organisations au préalable, ainsi que la mise en œuvre urgente de cette loi et de la loi Macron avec une communication sur ses dispositions en ce qu’elles créent de nouveaux droits pour les clients (celui de réserver en direct et pour moins cher une chambre d’hôtel) et de nouvelles obligations pour les loueurs de meublés de tourisme (déclaration obligatoire) notamment.
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